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Nouvel exécutif togolais: Faure Gnassingbé et Jean Lucien Savi de Tové à la tête de la 5ème République

Le Togo a un Nouvel exécutif togolais. Le 3 mai 2025 marque un tournant historique dans la vie politique du Togo avec l’élection de Jean Lucien Savi de Tové, 86 ans, comme nouveau président de la République et la nomination de Faure Gnassingbé au poste de Président du Conseil des ministres, inaugurant ainsi officiellement la 5ème République togolaise.
Le nouvel exécutif togolais: une nouvelle répartition des pouvoirs
Le parlement togolais, réuni en congrès spécial le samedi 3 mai 2025, a procédé à l’élection du nouvel exécutif togolais conformément à la constitution du 6 mai 2024. Cette session historique a vu l’élection à l’unanimité de Jean Lucien Savi de Tové comme président de la République, tandis que Faure Gnassingbé a été désigné Président du Conseil des ministres.
Cette nouvelle configuration du pouvoir exécutif togolais marque l’aboutissement d’une année de transition politique qui a permis l’installation d’un Sénat et la mise en place effective des institutions prévues par la nouvelle constitution. Le processus de transformation institutionnelle entamé en 2024 trouve ainsi son accomplissement avec l’instauration formelle du nouvel exécutif togolais, redéfinissant profondément les équilibres politiques du pays.
Seul candidat proposé par l’Union pour la République (UNIR), Jean Lucien Savi de Tové a été élu à l’unanimité par les 150 membres du congrès. À 86 ans, ce docteur en sciences politiques de Paris-Sorbonne possède un parcours politique riche et mouvementé qui s’étend sur plusieurs décennies. Sa carrière a débuté comme secrétaire général du ministère des Affaires étrangères après le coup d’État de 1967 qui porta au pouvoir Gnassingbé Eyadéma. Son parcours connut une interruption brutale lorsqu’en 1979, il fut condamné à dix ans de prison pour un présumé complot, aux côtés d’autres personnalités politiques dont Gilchrist Olympio.
Après l’ouverture au multipartisme dans les années 1990, il fonda le Parti des Démocrates pour l’Unité (PDU) et fut proposé comme Premier ministre par une coalition d’opposition en mars 1993, proposition rejetée par le président Eyadéma. Son engagement politique s’est poursuivi avec sa nomination comme premier vice-président de la Convergence Patriotique Panafricaine en 1999, puis comme président du Cadre permanent de dialogue et de concertation depuis mai 2009. Plus récemment, il servit comme ministre du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat dans les gouvernements d’Edem Kodjo et de Yawovi Agboyibo entre 2005 et 2007.
Jean Lucien Savi de Tové devient ainsi le premier président de la République sous le régime parlementaire de la 5ème République togolaise. Qualifié par le parti au pouvoir « d’opposant modéré ayant longtemps incarné le dialogue et la réconciliation », il accède à ce poste à un moment crucial de l’histoire politique du pays, apportant sa longue expérience et sa connaissance approfondie des rouages de la politique togolaise au nouvel exécutif.
La 5ème République et le nouveau régime parlementaire
La révision constitutionnelle du 6 mai 2024 a profondément transformé le système politique togolais, faisant passer le pays d’un régime présidentiel, en vigueur depuis l’indépendance en 1960, à un régime parlementaire. Cette transformation du nouvel exécutif togolais redistribue significativement les pouvoirs au sein de l’État. Le Président du Conseil des ministres devient désormais la figure centrale de l’exécutif, détenant l’essentiel des pouvoirs gouvernementaux et recevant l’allégeance des forces armées. Son maintien à ce poste est directement lié à la majorité parlementaire de son parti, créant ainsi une dépendance plus forte entre l’exécutif et le législatif.
En revanche, le président de la République occupe désormais un rôle essentiellement honorifique au sein du nouvel exécutif togolais. Élu par le parlement pour un mandat de 4 ans renouvelable une seule fois, il devient davantage un symbole de l’unité nationale qu’un véritable décideur politique. Ce changement de paradigme constitutionnel marque une rupture fondamentale avec la tradition présidentialiste qui prévalait depuis plus de six décennies au Togo. La 5ème République introduit ainsi un modèle de gouvernance inspiré des systèmes parlementaires occidentaux, tout en l’adaptant au contexte politique togolais et à ses spécificités.
Réactions politiques au nouvel exécutif togolais
L’avènement de ce nouvel exécutif togolais suscite des réactions contrastées sur la scène politique nationale. Le parti au pouvoir célèbre cette transition comme l’accomplissement d’une modernisation institutionnelle, avec l’élection d’une figure historique de l’opposition à la présidence de la République. Les partisans de la réforme soulignent la volonté d’ouverture politique et l’engagement vers un système plus représentatif, où le parlement joue un rôle central dans l’équilibre des pouvoirs.
Cependant, plusieurs partis d’opposition et organisations de la société civile contestent vivement la légitimité du processus. Selon eux, le nouveau système prive le peuple togolais de son droit d’élire directement son président, transférant cette prérogative fondamentale aux mains des parlementaires. Cette critique de fond s’est matérialisée par le boycott de la session parlementaire par deux figures emblématiques de l’opposition, Jean Pierre Fabre, président de l’Alliance nationale pour le Changement, et Me Paul Dodzi Apevon, leader des Forces démocratiques pour la République, tous deux députés à l’Assemblée nationale.
Une déclaration commune de l’opposition exprime avec force cette contestation : « Les parlementaires ainsi que les membres de la Cour Constitutionnelle qui ont participé au crime commis ce jour contre le peuple togolais, en validant le choix d’un Président du Conseil des ministres tout puissant bien que non élu par le peuple, en élisant un Président de la République à la place du peuple souverain, et en recevant le serment des nouveaux responsables illégitimes, seront tenus pour responsables devant l’Histoire. Ils auront trahi la souveraineté du peuple togolais. » Ce climat politique tendu illustre les profondes divisions qui persistent au sein de la société togolaise face à cette transformation majeure du système institutionnel.
Perspectives d’avenir pour le nouvel exécutif togolais
L’instauration de ce nouvel exécutif togolais soulève plusieurs questions fondamentales sur l’avenir politique du pays. La continuité politique constitue la première interrogation, puisque Faure Gnassingbé, qui a dirigé le pays comme président durant 20 ans, de 2005 à 2025, conserve l’essentiel du pouvoir exécutif dans ses nouvelles fonctions. Cette situation alimente les critiques de ceux qui voient dans la réforme constitutionnelle un moyen de contourner la limitation des mandats présidentiels pour permettre une prolongation de fait du pouvoir.
La question de la légitimité démocratique se pose également avec acuité. L’élection indirecte du président et la nomination du Président du Conseil des ministres par le parlement suscitent des interrogations sur la représentativité réelle de ce nouvel exécutif togolais et son adéquation avec les aspirations populaires. Le passage à un régime parlementaire représente par ailleurs un défi majeur en termes de stabilité institutionnelle pour un pays habitué au présidentialisme depuis son indépendance, nécessitant une adaptation des pratiques politiques et administratives.
La nomination d’un ancien opposant à la présidence pourrait néanmoins constituer une opportunité pour favoriser un dialogue renouvelé entre les différentes forces politiques. Jean Lucien Savi de Tové, fort de son expérience politique diversifiée et de sa réputation de modération, pourrait potentiellement jouer un rôle de médiateur dans un paysage politique fortement polarisé. Toutefois, les limites constitutionnelles de sa fonction pourraient restreindre sa capacité à influencer significativement les orientations du nouvel exécutif togolais.
Pour certains observateurs, cette réforme constitutionnelle apparaît comme un simple réaménagement formel permettant une continuité du pouvoir sous une forme institutionnelle différente. Pour d’autres, elle pourrait représenter une opportunité de renouvellement politique, sous réserve que les nouvelles institutions fonctionnent dans le respect du pluralisme démocratique et permettent l’émergence d’une véritable alternance. L’avenir du nouvel exécutif togolais dépendra largement de sa capacité à relever ces défis institutionnels tout en répondant aux aspirations économiques et sociales d’une population en attente de changement concret.