PORTRAIT – Léon XIV : qui est le cardinal Robert Prevost, le nouveau pape élu ?

Le cardinal américain Robert Prevost, 69 ans, a été élu pape ce jeudi 8 mai 2025 à 18 h 08. Ce religieux augustin a longtemps été missionnaire au Pérou avant d’être appelé à Rome par François, en 2023, comme préfet du dicastère pour les évêques. En le choisissant, les cardinaux confirment le choix d’une Église ouverte, multiculturelle et missionnaire.

Américain de naissance, Robert Prevost est issu d’un père d’origine franco-italienne et d’une mère d’origine espagnole, qui a passé une bonne partie de sa vie comme missionnaire au Pérou avant d’être supérieur de son ordre religieux à Rome. Voilà, en quelques mots, le parcours, exemplaire de l’Église multiculturelle chère au pape François, de celui que les cardinaux réunis en conclave ont élu le 267e pape.

C’est sous le nom de Léon XIV que le cardinal Prevost guidera désormais l’Église catholique, succédant à François, décédé le 21 avril dernier. À 69 ans, cet homme discret, presque timide, apporte avec lui un parcours missionnaire audacieux et une vision pastorale forgée entre les États-Unis et l’Amérique latine.

Un parcours atypique entre Chicago et le Pérou

Né à Chicago le 14 septembre 1955, Robert Francis Prevost a grandi dans une famille aux racines européennes diverses. Après des études en mathématiques et philosophie à l’université de Villanova à Philadelphie, il entre chez les Augustiniens en 1977 et est ordonné prêtre en 1982 à Rome.

Son parcours prend un tournant décisif en 1985 lorsqu’il part au Pérou pour une expérience missionnaire qui le marquera profondément. Conquis par la spiritualité et la chaleur du peuple péruvien, il y retourne en 1988 pour une décennie de service dans l’archidiocèse de Trujillo. Là-bas, il fonde une paroisse, dirige un séminaire et enseigne le droit canonique, la patristique et la morale.

Ce n’est qu’en 1999 qu’il regagne Chicago, élu provincial pour sa région d’origine. Sa carrière s’accélère quand il devient prieur général de l’Ordre de Saint-Augustin, fonction qu’il exerce pendant douze ans, de 2001 à 2013.

De l’Amazonie à la Curie romaine

En 2014, le pape François, appréciant son expérience missionnaire, le renvoie au Pérou comme administrateur apostolique puis évêque du diocèse de Chiclayo, une vaste région de plus de 15 000 km² comptant 1,3 million d’habitants.

Durant les crises politiques qui secouent le Pérou entre 2018 et 2022, Mgr Prevost révèle ses talents de médiateur comme vice-président de la conférence épiscopale péruvienne. Ces qualités pourraient s’avérer précieuses dans ses futures relations avec les dirigeants mondiaux, notamment avec le président Trump sur la question migratoire à la frontière mexicaine.

C’est durant son voyage pontifical au Pérou en janvier 2018 que François repère Mgr Prevost. Après l’avoir nommé membre de plusieurs dicastères, il lui confie en 2023 la direction du dicastère pour les Évêques, poste stratégique pour le renouvellement de l’épiscopat mondial.

Un pape dans la continuité de François

Membre actif du Synode sur la synodalité, grande initiative lancée par François en 2021, le cardinal Prevost s’est particulièrement impliqué dans les réflexions sur les nominations d’évêques et leur mode de gouvernance. Il a plaidé pour un processus de sélection plus inclusif, impliquant davantage les laïcs, tout en restant fidèle à la tradition de l’Église.

Sur la question du rôle des femmes dans l’Église, le nouveau pape devrait suivre la ligne tracée par son prédécesseur, écartant la possibilité de femmes diacres, mais favorisant leur présence à des postes de responsabilité. Son propre dicastère comptait d’ailleurs trois femmes.

Une polémique à surmonter

Le début du pontificat de Léon XIV est toutefois marqué par une controverse liée à son passé. Pendant ses années à la tête de la province augustinienne Notre-Dame-du Bon Conseil (1999-2001), il aurait permis l’accueil d’un religieux condamné pour abus sexuels sur mineurs dans un prieuré situé près d’une école primaire. Ce prêtre a finalement été réduit à l’état laïc en 2012.

Ironiquement, en tant que préfet du dicastère pour les évêques, le cardinal Prevost a eu ensuite pour mission d’appliquer les règles établies par François pour sanctionner les évêques coupables de négligence dans la gestion des cas d’abus.

Une Église multiculturelle et missionnaire

En choisissant ce cardinal américain d’origine européenne, formé à Rome et ayant servi près de vingt ans en Amérique latine, les cardinaux confirment leur vision d’une Église universelle, ouverte sur le monde et attentive aux périphéries.

Son pontificat, qui s’annonce dans la continuité de celui de François mais probablement plus serein, à l’image de sa personnalité discrète et paisible, devra relever des défis majeurs : poursuivre les réformes de la Curie, affronter la crise des vocations en Occident, et gérer les tensions entre traditionalistes et progressistes au sein de l’Église.

En prenant le nom de Léon XIV, le nouveau pape s’inscrit dans la lignée d’un des grands papes réformateurs du XIXe siècle, Léon XIII, auteur de l’encyclique sociale Rerum Novarum, signalant peut-être son intention de renforcer l’engagement social de l’Église face aux défis contemporains.